A plus d’un titre

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La saison ovale ferme ses portes sur un Brennus conquis comme un Everest, à l’estomac. Sans flottement. Paradoxe, à l’épreuve du jeu ne restent que des miscellanées, visions d’une synthèse nationale. C’est fini, fort d’un succès à effacer, soleil rouge comme un trait d’esprit devenu esperanto selon votre bon vœu à l’aller. Le «oui mais» aurait pu l’emporter sur le tas, mais il était un poil trop court.

Après cent cinquante articles et vingt-cinq milles commentaires rédigés avec appétit, Côté Ouvert ferme ses portes sur le site de L’Equipe. A l’image du Racing, remanié et clairement emmêlé par les mystères de l’échec à l’horizon au point de marquer une pause. Presque tous étaient contre, malgré Bhastag et Gladiator. Il était le show et le ciment de la génération Titi surbokée aux bons Boers – Tot siens, les ami(e)s, décoiffé(e)s au poteau par quatre nuances de bleu.

En l’absence de Sir John, l’élite se délite du nord au sud – top pas top – et ceux qui tombent comme ceux qui s’éloignent n’ont même pas peur de la sale attente parce que le big banc, à l’origine du maul, avait une faim record de ces vitamines du bonheur, autant dire une affaire de cachet – et de trois ! – pour la route. Ils sont du même club par chaos à la petite semelle lancée de justesse. Ca fait reset, comme la télé réalité. C’est permis, vingt ans après.

L’Aviva shake était un cœur de cible. Toulon, esprit commando, est devenu champion. Dix de France dans le détail, d’ailleurs, Jonny «play it again» Wilking soignait les détails, et c’était cadeau. Mais s’il s’agit de faire trois passes, à la limite, je vote Giteau, toujours placé dans l’axe du mieux, à points nommés. Puis, par un glissement, la science physique adopte hélas un joueur to lose…

Pour jouer la note bleue et le bal au centre d’une passe à l’autre, mieux vaut faire ses gammes au vert, debout, en regardant plein nord sans appeler SOS médecin. Le French Flair, c’est haut, c’est même au plus haut ; plus dur qu’une simple question d’attitude. Ce cousu main, cette chanson de geste, demande du doigté. Ce n’est pas de la sauce kiwi, même si les saveurs sont dans le buffet.

Pas de vos larmes, citoyens : le virage est relevé, certes, mais ce blog Goze toujours sans mettre cap au pire, ni l’Europe en berne. Même s’il est parfois sec à sept. Choix charnière fait pour durer ? On l’espère. Personne pour nous empêcher d’aller visiter Vic en Béarn, d’ouvrir le nouvel agenda bleu, de dessiner au tableau noir «Remember Auckland» ou un trait d’esprit jusqu’à l’hallali, et pas toujours ensemble. Qu’importe l’arbitrage tout court, nous sommes une filière de forts rêveurs

Pour le prix de l’essence, avec un malus, nous avons voyagé à Twickenham, repris London calling et Land of my Fathers, foncé vers Lille de la tentation, d’un stade l’autre, même quand il affiche complet. N’oubliez pas, il y avait au tout début une tribune pour Max, ce polyvalent.

Côté Ouvert, c’est un trait d’esprit, l’esperanto à votre bon vœu. Pour les duellistes, ce blog est un rocher à remonter : quelle histoire ! Tout un roman… J’espère que celui-ci, ouvert donc depuis le 26 octobre 2012, a répondu à vos souhaits. Il contenait beaucoup de mots, de maux et d’émoi, en décalage, au parfum. Certains d’entre vous, qui ne sont pas montés en marche le jour de la fête du bruit, lui ont mis neuf sur dix.

Dans la lumière de Juilet, il me faut revenir de l’autre côté. Vite, après le Frexit un havre en zinc, même pour une heure, seul contre tous en trompe l’œil ! Je ne suis pas un martyr : au plaisir de nous retrouver en petit comité sur le nouveau Côté. L’âme bleue ouverte dans votre tenue de sortie, restez en quinconce.

P.S. : en cadeau de départ, la photo du terrain de Loretto, au sud d’Edimbourg, établissement scolaire où fut disputé en 1855 le premier match de rugby avec les règles du hacking (croc-en-jambe) sous la direction du directeur, M. Almond. Ce qui débouchera sur la rupture rugby-football en 1863 et l’émergence des « nouvelles » règles (déjà !) en 1871.

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Tenue de sortie

Entre Barcelone et Tucuman, il faut croire qu’un fil, bleu, était tendu, et plus que ténu. On a suffisamment regretté ici l’indigence du Top 14 et le manque de personnalité de notre équipe nationale ces derniers temps, et même plus en amont, pour ne pas bouder notre plaisir devant la performance du Racing 92 et celle du XV de France. La saison ovale se termine donc en apothéose, y compris du côté – ouvert – de Tokyo, alors qu’on aimerait qu’elle ne s’arrête pas en si beau et si bon chemin.
Un record de spectateurs pour une finale de Championnat, 99 124 au Camp Nou, dont certains des Quinconces, mais surtout un spectacle complet : suspense, drame, tension, exploits, passion. Et pour finir un beau champion. Toulon s’est délité en supériorité numérique, ce qui est assez incompréhensible, et dénote l’absence de leader tactique. Le Racing 92, dont on craignait qu’il ne prenne une veste mais qui au contraire la porta avec classe en hommage au Showbiz, s’est sublimé à quatorze après la sortie de son demi de mêlée sur carton rouge. Ce qui nous ramène encore une fois à la notion d’équipe.
L’Irlande l’avait décroché dans les mêmes conditions, au Cap, face aux Springboks ; le Racing 92 l’a confirmé devant Toulon à Barcelone : quand elles s’unissent, s’allient, se lient, ne forment qu’un en regardant et en poussant dans la même direction le temps d’un projet commun, les ressources des êtres sont insoupçonnées. Ce qu’on appelle l’esprit d’équipe. Les Franciliens l’avaient et quand leur capitaine, Dimitri Szarzewski, avouait à l’issue de la victoire in extremis devant Clermont à Rennes que ses coéquipiers et lui s’aimaient, et que c’était là la clé de leur succès, il fallait le croire.
Démonstration des All Blacks, certes, mais surtout des Anglais en Australie, trois tests à rien là encore. Des Anglais qui ont aussi été sacrés champions du monde chez les moins de vingt ans, avec un phénomène d’ouvreur, Harry Mallinder, fils de Jim, coach des Saints de Northampton : buteur précis, animateur emballant et allure de golden boy. Avec lui, le XV de la Rose est tranquille pour la prochaine décennie. Nous, nous avons trouvé Antoine Dupont, Alexandre Roumat et Damian Penaud.
Et surtout Baptiste Serin, là-bas à Tucuman, au pays des oranges et des pelouses patatières. Mais pour rester avec les Anglais, leur Brexit, qui coupe le pays de la Gracieuse en deux, donne déjà du relief au prochain Tournoi des Six Nations. L’Anglais, sa conduite et sa monnaie, inventeur entre autres du jeu de rugby, reste une énigme qu’il est agréable de tenter de résoudre à grandes rasades de bière tiède dans un pub à la moquette épaisse et aussi collante que le bar en bois qu’il abrite.
Si l’Europe se trouve soudain dépeuplée de sa tribu la plus décalée, nos envies d’outre-Manche sont relancées. Twickenham redevient une destination exotique et je me revois encore dans le Temple pour un Lions britanniques et Irlandais vs Barbarians britanniques (14-23) en 1977, forts des frères flankers, Jean-Pierre Rives et Jean-Claude Skrela, encadrant Jean-Pierre Bastiat, vilipendé dans ce même stade quelques mois plus tôt. Mon voisin cravaté Cambridge recelait dans son Barbour deux flasques remplies d’un douze ans d’âge quand son épouse ouvrait en tribune une valise garde-manger en osier, assiettes de porcelaine et gobelets en argent, une heure avant le coup d’envoi. C’est ainsi que j’apprécie les Anglais.
PS : ceci est l’avant-dernier Côté Ouvert. Les blogs de L’Equipe vont fermer très prochainement. Je vous dis à vendredi, pour la der. Ce sera la 150ème. Un symbole, non ? Vous pouvez continuer à échanger ovale sur ma nouvelle adresse.

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En décalage

Toulon-Racing à venir nous ramène en 1987. Le GPS dans le dos remplace le noeud papillon rose autour du cou, mais le Racing 92 a renoué, vendredi dernier à Rennes, avec la folie du Showbiz. On parlera longtemps, pour le plaisir parce qu’elle a condensé toutes les émotions en cent minutes, de cette demie face à Clermont. Le Top 14, auquel on reprochait de se déliter, est redevenu d’élite par la magie d’une rencontre débridée, décousue, indécise, spectaculaire, émouvante.
Le Racing 92 annoncé aussi fermé que ses entraînements à huis clos a réconcilié tension et passion, suspense et pression, engagement et vista, transpiration et inspiration dans un petit écrin breton baigné de lumière. Rien de ce qui était annoncé ne s’est produit, y compris côté météo. Pour ça le rugby est grand. Jusqu’à voir les deux présidents épaule contre épaule, presque enlacés dans les derniers instants d’une prolongation irrespirable.
A Rennes, j’ai croisé Philippe Guillard prend de projets et de lucidité, Mourad Boudjellal qui m’a immédiatement reproché une phrase de ce blog dont il est lecteur avant de se montrer affable et agréable comme il sait l’être ; un ancien grand entraîneur toulonnais devenu chroniqueur qui prenait le responsable com du Racing pour un serveur de crêpes devant le buffet média, et Abdel Benazzi soucieux d’expliquer en quoi Jake White n’était pas un fossoyeur de talents français.
Pas de trafic dans les rues de Rennes, trois minutes chrono pour aller d’un point à un autre, disons de mon hôtel situé à une poignée de kilomètres du stade sans un bouchon, si ce n’est ceux des bouteilles de cidre offertes à la dégustation. Ces demies très cervoise avaient le parfum de la phase finale ancienne version, quand il fallait dicter ses comptes rendus et s’agglutiner dans une zone mixte exiguë. Bonheur que de se planter devant Juan Imhoff, Dimitri Szarzewski, Scott Spedding, Fulgence Ouedraogo, Guilhem Guirado, à la hauteur de l’événement dans l’émotion qu’ils firent passer au coup de sifflet final, les mots qu’ils choisirent.
La veille de chaque demie, les entraîneurs – c’est contractuel – se rendent en conférence de presse. Laurent Travers, Jake White et Bernard Laporte furent diserts, parfois drôles, toujours décontractés. Seul Franck Azema transmit son stress, palpable. Ça ne veut peut-être rien dire. Ou alors ça veut tout dire, selon. Il faudra un jour que l’ASM Clermont se pose les bonnes questions.
A celles que nous n’avons pas eu le temps de poser à Azema après la défaite, cruelle, de son équipe, il dégainait déjà ses réponses ; elles visaient l’arbitrage comme souvent quand une équipe perd. Pas un mot sur les six points d’avance gâches en prolongation, le dégagement foireux d’Aurélien Rougerie en fin de prolongation, la touche pas trouvée par Brock James et la passe aveugle de Ludovic Radosavljevic. C’était sans doute trop sensible, trop gênant et obligerait à des remises en question qui ne sont pas au programme RH de Michelin.
Particulièrement stratégiques, ces demi-finales ! Attaquer très vite l’espace balle en main après l’ouvreur, côté Racing 92 ; détruire frontalement le mental héraultais en multipliant les assauts quitte à ignorer les décalages, côté Toulon. Volonté offensive au Racing, qui n’avait habitué personne à une telle débauche de passes dans ses propres vingt-deux mètres ; volonté d’érosion à Toulon, qui a retrouvé l’héritage de Bakkies Botha et qu’on ne croyait pas aussi solidement armé pour percuter ainsi.
Remarquer aussi le nombre important de plaquages au sol sans ruck derrière afin de permettre à la défense de contourner l’édifice sans être hors-jeu, ce qui permit en toute fin de prolongation au Racingman Juandré Kruger d’intercepter librement pour offrir le ballon d’essai et de succès à Juan Imhoff, boosté par l’hommage qu’il voulait rendre au fils de son premier entraîneur, décédé trop jeune ; ce même Kruger qui n’a rien trouvé de mieux que de twitter son obstruction sur Strettle. Déplacé.
Pendant que les demies de Top 14 réchauffaient les cœurs à défaut de faire vibrer les chœurs – peu de supporteurs des quatre clubs à Rennes -, le XV de France des bizuths (sept nouveaux capés au coup d’envoi, dix au final) affrontait à Tucuman des Pumas modelés cette année par le Super Rugby. Et que croyez-vous qu’il arrivât ? Et bien les petits Bleus furent enthousiasmant d’élans offensifs, jouant dans la défense, utilisant l’espace et le ballon comme rarement depuis au moins une décennie, dans le sillage de Serin, Gourdon, Poirot, Goujon, Picamoles, Atonio, Bonfils et capitaine Plisson. Le score ? Pour une fois, on s’en souciera peu. Seul souci, la France se retrouve neuvième au classement mondial.

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Fête du bruit

Ceux qui s’attendaient à vibrer au son des trompettes, des cornes de brume, des crécelles et des chants à l’entame de la phase finale en sont pour leur billet d’entrée. En fait, s’il y avait des tambours en tribune, les percussions étaient sur le terrain. Du coup, aucune appogiature. En frappant fort sur la ligne d’avantage, Racing-Toulouse et Montpellier-Castres ont fini par taper sur les nerfs.
A Colombes, il faut savoir que la tribune de presse hérite d’un énorme haut-parleur de fête foraine accroché à l’un des pylônes qui soutient la toiture et aveugle un petit bout de terrain. Mais il n’y avait pas besoin de trop se tordre le cou : nous étions du bon côté pour voir Fickou marquer, Dulin relancer, Rokocoko relayer et Toto Travers changer vite fait son pilier remplaçant pour le titulaire resté sur le banc à côté de lui pendant trois minutes seulement.
Le rugby pro est cynique. Il oblige un poupon de 22 ans, deux feuilles de match en comptant celle de samedi dernier, à simuler une blessure au mollet pour laisser revenir celui qu’il était censé remplacer dans les dernières minutes. Mais c’est dans ce choix d’urgence validé par le règlement que le Racing n’a pas perdu dans l’ultime instant son barrage contre la bravitude, repoussé qu’il fut devant sa ligne d’en-but par un Toulouse hors d’âge, Harinordoquy, Clerc et Flynn sortant définitivement du champ d’honneur dans la confusion la plus totale.
De confusion, il en fut question aussi au stade des échafaudages. Castres n’a pu organiser son mikado à l’Altrad Stadium, et les mécanos de Montpellier, qui adhérent au syndicat des « Frères du Plessis and Co », ont boulonné leurs ballons portés pour finir déchirés du maillot dans une algarade qui n’avait même pas le goût pur mâle d’une vraie générale, et finit par donner du Trop 14 une image frelatée, et pour tout dire une impression désagréable de pourri cup.
Auparavant, en début de semaine, des Bleuets trop sages s’étaient plantés dans les grandes largeurs face aux Pumitas dont Fabien Galthié – qui fut consultant à Buenos-Aires – me disait qu’ils évoluaient tous dans des clubs amateurs, quand nos espoirs travaillent depuis deux ans dans une usine à champions ; et on croit volontiers qu’ils s’y retrouvent essorés, dans l’Essonne. Heureusement, la chance sonne deux fois, et avec deux fils de, Damian Penaud et Alexandre Roumat, pour les débrider face au Japon, ils ont désormais l’espoir de mieux figurer dans ce Championnat du monde des moins de vingt ans.
Retour à Colombes, où Toulouse est tombé ballon en main. Ou alors c’est l’inverse. Qu’importe. Au coup de sifflet final, pas de querelle : anciens et jeunes genoux à terre, larmes aux yeux, cœurs serrés. Pour tout un tas de raisons : ils avaient perdu après s’être égarés durant la saison, ils perdaient aussi les meilleurs d’entre eux en s’inclinant au terme de ce match couperet. Leur peine tranchait avec l’explosion de hurlements balancés sans discernement ni retenue dans la sono, volume à fond.
Alors qu’un court moment de silence aurait été de la plus sportive dignité, un speaker de foire encourageait sans répit le public de Colombes, pas vraiment amateur de match en fanfare, à « faire du bruit ». Car c’est bien de cela dont il s’agit en rugby désormais : faire du bruit. Celui qui vacarme le plus fort a gagné. Quoi, on ne sait pas, mais il a gagné. On peut juste craindre, mais nous le saurons samedi soir à Rennes – au fait, qui d’entre vous sera au Roazhon Park ? – que les demies soit la fête du bruit à défaut de celle du jeu.
On espère juste que Clermont et Toulon ont prévu d’ouvrir pour obliger ainsi les outsiders, Racing 92 et Montpellier, à sortir de leurs gonds. Parce que pendant ce temps-là, alors que la France, affalée sur la grève, convoque fissa les oubliés de la phase finale pour se compter quinze à Tucuman, les autres nations du Nord relèvent leur niveau. Huitième nation mondiale, juste, mais alors tout juste devant l’Ecosse, il ne faudrait pas que la France perde tout en ce mois de juin : son rugby, ses espoirs et son standing. Parce que neuvième, c’est la perspective d’être dans le troisième chapeau en mai prochain, au moment du tirage au sort des poules du Mondial 2019. Vous imaginez d’ici le bruit que ça ferait.

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Montée en marche

Bayonne retrouve le Top 14 après une seule saison d’exil, encore que la ProD2 soit mieux qu’une punition. Décimé et critiqué, l’Aviron est remonté en jouant sur les ressorts de la solidarité et du plaisir au jeu tels que compressés par Vincent Etcheto. Et ça me fait penser à une des nouvelles de Benoit Jeantet* dans laquelle il est question d’un entraîneur peu commun.
«Entraîner, c’est juste un autre moyen de rendre les joueurs heureux. Tout ce qui m’intéresse, ce n’est pas de faire de vous des meilleurs rugbymen, dit-il, à un de ses joueurs. Non. Je veux juste essayer de faire de vous de meilleurs hommes. A vous enseigner que la source du bonheur, c’est en vous qu’elle s’écoule. Pour ça, je suis prêt à donner beaucoup. Beaucoup de moi-même. Et toi, qu’es-tu prêt à nous donner ?» Avant de poser sur la table de massage un message : «L’ascension du mont Ventoux», de Pétrarque.
Le mont Ventoux est un trompe l’œil qui culmine à 1912 mètres au milieu de la plaine. Son dôme se découpe dans le ciel de Provence. Pendant vingt-deux kilomètres, les cyclistes professionnels effectuent son ascension en une heure. Les marcheurs, eux, mettent une journée depuis Malaucène.
En 1336, Pétrarque, trente-deux ans, se décide à gravir cette « masse abrupte, presque inaccessible, de terre rocheuse» en choisissant un raccourci. « J’errais encore dans la vallée, sans qu’aucune voie plus facile ne s’offrit à moi ; je n’avais fait qu’allonger ma route, et augmenter en vain ma peine. En réalité, je refusais la fatigue de l’ascension. » En tentant l’escalade du mont Ventoux, Pétrarque se met à nu, étale ses imperfections : prétention, entêtement, paresse.
Cet ouvrage, laissé à dessein sur une table de vestiaire, nous indique comment gravir notre propre sommet, comment nous hisser quand tout nous tire vers le bas en pente douce, à commencer par notre volonté la plus commune, celle du moindre effort. Petrarque mesure combien il est difficile de rester sur le chemin le plus exigeant tant nous trouvons tous de bonnes excuses pour ne pas nous élever aussi haut et aussi vite que nous l’aurions souhaité.
Pétrarque n’a jamais gravi le mont Ventoux. Et cette lettre à son confesseur, il l’a écrite dix-sept ans après avoir voyagé, assis derrière sa table. Alors pourquoi « L’ascension du mont Ventoux ? » Pour vaincre l’engourdissement. Pétrarque écrit : «Vouloir ne suffit pas : tu dois désirer pour réussir. » Le désir, c’est ce qu’a fait naître Vincent Etcheto dans le vestiaire de Jean-Dauger en juin dernier, au milieu d’un groupe de joueurs en perdition, sans repères, sans certitudes. Un an après, dans les pas de son grand-père et de son père, Roger, lui aussi ouvreur et entraîneur, il a offert à Bayonne une montée.
Son père avait l’habitude de répéter à celui qui lui demandait comment instiller le virus de l’attaque : «On ne met pas en place un rugby de mouvement avec des idées arrêtées. » A l’heure où commence la phase finale de Top 14, celle de ProD2, qui vient de se terminer, nous a beaucoup donné.
* Comme si le monde flottait, Benoit Jeantet (éditions Salto)

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Flottement

Je ne sais pas si ça va mieux, mais pourquoi donc faudrait-il tomber en sinistrose parce qu’on se réveille tard ? Thierry Dusautoir le glissait en conférence de presse, la semaine dernière : nous n’avons sans pas ouvert les yeux assez tôt. De quoi voulait-il parler ? Des liens humains qui se distendent au sein du rugby professionnel.
Et pourtant, Pau, Toulouse, Montpellier finalement, et Bayonne ont salué comme il se doit ou comme ils le pouvaient, la génération 2000 qui prend sa retraite, la trentaine dépassée. Comme quoi c’est encore possible, même avec beaucoup de maladresses, n’est-ce pas Timoci Matanavou, n’est-ce pas François Trin-Duc ?
J’ai aimé la standing ovation du public de Jean-Dauger pour la sortie de David Skrela, dimanche. Si je ne devais garder qu’une seule image ce serait celle-là. Tout l’esprit rugby était dans ces applaudissements spontanés, rien de prémédité, d’arrangé, d’un peuple ovale à un de ses enfants qui n’est même pas basque. Dans un stade qui porte le nom du plus grand.
Quand nous avons choisi d’écrire « Rugby au centre » avec mon ami Jacques Rivière, nous sommes allés voir Jean Dauger. Avant tout autre trois-quarts centre. C’était en 1983 et il flottait. Après plus d’une heure d’entretien au plus profond de la philosophie ovale, Manech – Jean, en basque -, ainsi que l’appelaient ses amis du pays, nous accompagna, immense parapluie ouvert, jusqu’à notre voiture et nous glissa un « Bonne quête » qui ne nous quitte pas depuis.
Il aurait aimé ce moment chargé de symboles, Manech… Dans l’espace anxiogène qu’est devenu le rugby pro, les marques profondes de respect, de reconnaissance naturelle, de partage et d’unisson méritent d’être soulignées et appréciées. Il y avait des pleurs, des larmes et des sanglots, le week-end dernier. C’est pour cela que le rugby est grand. Surtout.
On regrette souvent ici que les visiteurs de l’autre hémisphère débarquant en grand nombre fassent de l’ombre à nos jeunes pousses qui tardent à éclore. Alors quand je vois jouer Sanga et Chaume avec Clermont, Oz avec Grenoble, Javaux et Chauveau avec le Racing, Daguin et Macalou avec le Stade Français, Saurs, Bouvier et Miquel avec Agen, je me dis qu’il y a encore des générations à découvrir, des carrières à suivre.
Ce n’est pas une question d’âge, finalement, que de tisser des liens. J’ai reçu, grand plaisir, ce lundi une lettre de Michel Sitjar, 73 ans et pas une ride à la rime. Il m’engage d’une écriture nette à écouter la Polonaise Héroïque. « Cela m’enthousiasme, tous ces morceaux de musique dans lesquels on sent le génie exprimer magnifiquement l’amour de son pays. » J’avoue en préférer une autre mais le contact est établi.
Qu’aurait donc bien pu écrire Antoine Blondin sur « l’absurdisme » – un néologisme made in Sitjar – des rebonds topquatorziens ? Cette « volonté cruelle », ajoute le poète de La Magistère, ce « brouillard effrayant et épais ». Blondin et Sitjar échangeaient souvent, flottant dans les degrés. On ne passe pas par Golfech, c’est un fait, mais il est regrettable, ne serait-ce que pour écouter la maison aux oiseaux depuis cette berge de la Garonne.
Vous, je sais pas mais moi ça va mieux quand je lis de la poésie. Dernièrement, j’ai reçu le dernier opus de Benoit Jeantet (souvenez-vous, il avait rencontré ici même Charles Juliet pour évoquer le pays du long nuage blanc). Là, il s’est mis au vert et à la prosodie sur azerty. « Comme si le monde flottait ». Ainsi titré ce recueil de nouvelles ciselées et ovales. Aux éditions Salto. Adoucissant.

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Ceux qui s’éloignent

C’est un tome de l’histoire du rugby français dont l’écriture se termine à l’annonce des retraites d’Imanol Harinordoquy, de Clément Poitrenaud et de Damien Traille. D’autres pages sont néanmoins à prévoir dans les semaines à venir, une fois la phase finale terminée. Ainsi va le rebond ovale : le sport est pratiqué par de jeunes gens dans la force de l’âge et nous, observateurs, fermons et ouvrons des chapitres.
Ces trois-là ne sont pas tout à fait nés à l’heure du rugby professionnel. Imanol gardera précieusement dans sa mémoire vive son premier titre, obtenu avec ses copains de l’US Nafarroa-Garazi. Clément, un artiste, a aimé exposer ses œuvres photographiques sans fausse pudeur et avec finesse. Damien est revenu aux sources et va poursuivre la filiation, le rugby comme trait d’union.
Trois internationaux aux personnalités contrastées, parfois mal comprises. Ils ne pleuraient pas pour une mauvaise note dans L’Equipe, n’ont jamais envoyé leur attaché de presse ou chargé de com ou agent négocier une interview, évoquer un article qui n’aurait pas été écrit à leur avantage, annoncer une opération marketing. Leur accès était direct, sans fard. Il le restera.
Imanol – ça signifie Emmanuel, en basque -, tout comme Clément et Damien, auraient encore pu jouer une saison. Ils partent avec de bons sentiments à faire partager. Avec eux, ce sont les années 2000 qui s’estompent un peu. Il en est ainsi à chaque décennie. La vie est ainsi fête. Le rugby, lui, gardera leur trace, celle de leurs exploits, de leurs déboires, de leurs peines et joies ; de leurs coups de gueule, surtout celui d’Imanol à l’issue du Mondial 2011, l’année où la France pouvait vraiment devenir championne du monde sur un seul match.
Ce qui les réunit ? L’émotion qu’ils transmettaient naturellement. Ce que je garderai d’eux ? D’Imanol une séance d’interview en 2002 où il avait commandé un chocolat à la brasserie d’Aguilera et semblait tellement stressé, tendu, soucieux de ne pas répondre à côté. Je l’avais trouvé touchant de sincérité. Il m’avait interrogé. « Qu’est-ce que vous me voulez ? ». Un an plus tôt, j’avais rédigé son premier portrait et appris de lui la traduction de son prénom. J’ai eu plus de chance que Jacques Brunel et Abder Agueb, qui prirent un raffut pour la même question.
De Clément la façon magnifique dont il a su rebondir, garder la tête haute, le buste droit et le regard clair, après sa mésaventure à Twickenham, ce rebond de trop dans l’en-but face à Robert Howley. De quoi finir là. Lui est reparti plus haut, mieux, fort. Une leçon. Comme celle que donne Damien. Février 2007 à Agilera. Séance photo pour L’Equipe Mag. Damien, les coudes en sang, a plongé trente fois devant l’objectif sur un terrain gelé à la demande de Gérard Rancinan. Le cliché est magnifique. Damien a joué ouvreur, centre et arrière en équipe de France sans état d’âme. Les trolls des réseaux sociaux ont ironisé sur lui plus que sur tous les autres de ses coéquipiers. Lui n’a jamais répliqué car c’est un vrai gentil, un passionné de ce jeu, un coéquipier modèle. Fils de (René, Oloron), il est désormais père de (Enzo, Biarritz). Bon sang…
Que nous disent sur nous ces trois joueurs ? Qu’ont-ils semé sur et en dehors des terrains ? Quels lendemains nous annonce leur retraite sportive ? Je n’ai pas de réponse, aujourd’hui, à ces questions que je me pose. Que je vous pose. En fait, Imanol, Clément et Damien, qui ont beaucoup et tout donné, nous demandent après plus de dix ans de carrière : qu’est-ce que le rugby ? Qu’en avez-vous aimé ? Celui des Four ou des Six nations ? Celui qui est Super ou celui qui est Top ? L’Europe ou l’entropie ? Le terroir ou le tiroir-caisse ? Damien, Clément et Imanol nous adressent donc une passe à la croisée du chemin.
Resteront la saison prochaine Frédéric Michalak à Lyon et Vincent Clerc à Toulon. Relancés sur des terres d’exil. Ils veulent prolonger leur vie de rugby. Et les nôtres par rebond. Pour encore quelque temps. Le temps qui se rétrécit en fin de saison. ne restent que six semaines. Elles mèneront sans répit ni repos jusqu’au final à Barcelone. Six semaines pour sacrer le meilleur du rugby français, comme un hommage – on l’espère – à ceux qui s’éloignent.
Postface : mon ami Sébastien Boully, depuis Cannes, me parle de «Mercenaire», réalisé par Sacha Wolf. L’histoire à Fumel d’un joueur de Wallis et Futuna. Très applaudi. Avec un prix à la clé – label Europa Cinéma – lors de la Quinzaine des réalisateurs. A voir donc.

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Aux bons Boers

Lyon est devenu en deux jours la capitale des goals et des Boks après avoir été celle des Gaules et des canuts. Les Sud-Africains de Montpellier ont remporté un – petit – titre européen, avec seulement deux sélectionnables pour le XV de France dans leur lot, O’Connor et Ouedraogo, pour trois Du Plessis ; et les Saracens avec eux aussi leur Du Plessis, sont devenus – enfin – Champions d’Europe. L’Afrikaner à l’honneur, on craint de mesurer l’impact des succès Saraboks et Languebok sur les prochains recrutements hexagonaux.
Ironie mise à part, les Saracens rament depuis si longtemps de l’autre côté de la Manche qu’il était temps pour eux d’être inscrits dans le gotha. Leur victoire en Champions Cup est le fruit de la vision d’un milliardaire londonien de l’immobilier, Nigel Wray, dont l’épiphanie ovale survint dès que le rugby fut autorisé par l’International Board à sortir de sa gangue amateur, en aout 1995. Et la première idée du premier président tirroir-caisse de l’histoire du rugby pro fut de recruter l’icône française des valeurs du terroir, l’Agenais Philippe Sella.
Jacky Lorenzetti et Mourad Boudjellal n’ont pas le privilège d’avoir enrôlé le meilleur ouvreur du monde pour essayer d’emporter quelques titres : Wray loua dès 1996 les services du wallaby Michael Lynagh, qui était le Wilkinson, voire le Carter, de son époque. Suivirent François Pienaar, Abdelatif Benazzi, Thierry Lacroix, Thomas Castaignède et Alain Penaud sous le tarbouche, ce fez rouge arabo-turc symbole d’un club à part, première équipe barbarian d’Europe dix ans avant le RC Toulon.
Tétanisés par l’enjeu, priant Dan Carter – mais si, messie – de leur ouvrir d’un coup de patte forcément magique les portes de l’histoire alors même que l’ancien All Black était à peine capable de tenir sur ses deux jambes – mollets droit déchiré, genou en vrac du même côté – les coéquipiers du revenant Szarzewski n’ont jamais été en position de l’emporter même lorsqu’ils n’étaient menés que de six points. Depuis deux saisons, le ballon porté est devenu la carte maîtresse des équipes à gros packs. Il est l’atout majeur du Racing 92. Samedi, cette tactique a montré ses limites, et s’ils veulent de nouveau participer à une finale, européenne l’année prochaine ou de Top 14 dans un mois et demi, il va falloir que les Franciliens changent de tonalité, de mélodies et d’accompagnements.
Le Racing 92 n’inscrira donc pas son nom sur le palmarès européen aux côtés de Toulouse, Brive et Toulon. Pour l’instant, il reste avec les finalistes malheureux, Colomiers, Perpignan, Biarritz, Clermont et le Stade Français. L’écart était trop important entre des Saracens maîtres de leur stratégie (systématiquement avancer au pied et à la main) et des Franciliens écrasés par l’enjeu soudain trop gros pour eux malgré la présence d’internationaux d’importance (Szarzewski, Charteris, Carter, Rokocoko) à plus de soixante sélections. Une équipe n’est pas l’addition de ses composantes, elle est bien davantage. Ce «plus», le Racing 92 ne l’avait pas.
Qu’entendre par «plus» ? Une vision stratégique commune adaptée à l’adversaire et aux conditions climatiques. Le coach Travers avait beau hurler depuis le bord de touche d’occuper le terrain, rien n’y faisait. Machenaud, Carter, Goosen et Dulin ne surent pas le faire au bon moment. Leurs remplaçants, Phillips et Talès, ne s’y essayèrent même pas. C’est ainsi que le Racing fut dominé.
Restait à bonifier quelques choix tactiques, comme les ballons portés. Mais la défense anglaise a été remarquable de maîtrise technique pour éclater la carapace des «tortues» franciliennes, ne pas se consommer dans les rucks et impacter le porteur du ballon sur la ligne d’avantage par un double plaquage. Rarement finale de Coupe d’Europe a été si peu indécise. Qu’importe, le Racing, fait pour durer, y reviendra. C’est inscrit. Les Saracens ont attendu vingt ans pour parvenir à leurs fins. Les Franciliens, relancés par Lorenzetti il y a dix ans déjà en choisissant l’option kiwi plutôt que boer, ne mettront pas – on l’espère pour eux – autant de temps pour trôner au sommet de l’Europe.
Epilogue. Maurice Prat s’en est allé, dimanche. Il m’avait reçu chez lui la première fois en 1984, pour m’expliquer le jeu à la Lourdaise. Nous rédigions «Rugby au centre», avec mon ami Jacques Rivière. Il m’avait surtout instruit ce jour-là du sens de la passe, des principes du jeu sans ballon, de l’importance de la précision des gestes, tout en déplaçant ses fauteuils en chêne pour figurer nos adversaires. Quelques mois plus tard, j’entrais à L’Equipe et ses mots, ses expressions, ses regards, ne m’ont pas quitté depuis. Nous nous sommes revus, certes, mais cette première rencontre reste pour moi fondatrice.

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Frexit

Au moment où le Racing 92 et Montpellier s’apprêtent à vivre, mi-mai, leur première finale à Lyon, au stade des Lumières, les Franciliens dans la Champion’s et les Héraultais en Challenge, il est question par ailleurs de sortir de l’Europe. En effet, quitter ces compétitions est l’une des idées forces du programme de Pierre Salviac, candidat à la présidence de la FFR face à Pierre Camou, Bernard Laporte et Alain Doucet (même si Lucien Simon sera nommé prochainement et officiellement tête de liste). Cette proposition de gouvernance est rejetée par les deux-tiers des passionnés de rugby, si j’en crois les internautes de L’Equipe. N’empêche.
On peut comprendre le Frexit. Depuis qu’elle est désormais installée en Suisse pour des raisons assez faciles à saisir – ce doit être la qualité de l’air -, la voici aussi devenue très nettement franco-anglaise, cette Coupe d’Europe. Il suffit pour s’en convaincre de regarder les oppositions sur le terrain des deux phases finales. D’ailleurs, elle n’a même plus «Europe» dans son appellation générique. Et même peu de saveur sportive, comme en témoignent les faibles affluences des récentes demi-finales.
Sortir de l’Europe. Cette question ne se pose pas qu’en rugby. Elle est dans l’air du temps. Ce qu’a saisi Pierre Salviac puisqu’il propose aussi une «e-administration» – comme pour nos impôts, qu’on le veuille ou non – et la réduction du nombre de comités sur le modèle des régions administratives voulue par nos gouvernants. Salviac président, sa volonté sera de construire un Tournoi des Six Nations en matches aller et retour pour gonfler les recettes et payer ainsi les internationaux français à l’année. C’est appréciable et, franchement, ça se tient.
Réduire d’un côté les frais de fonctionnement et de déplacement, et aussi les comités ; mettre en vente Marcoussis pour faire revenir les bureaux de la FFR dans Paris. Supprimer surtout la LNR pour la remplacer par une Commission fédérale du rugby d’élite. Le rugby va donc si mal que ça ? Réduire d’un côté et augmenter de l’autre. Ainsi le nombre de matches dans les Championnats de Fédérales et de Séries régionales afin de couvrir les frais de fonctionnement des clubs. Augmenter enfin et surtout le nombre de clubs dans l’Elite, et pas qu’un peu puisqu’il est question chez le Rochelais de monter de 14 à 32, en deux zones : Ouest et Est.
Pierre Salviac fait le pari du rugby amateur au détriment du rugby professionnel. Calcul politique. Il pense sans doute récolter plus de voix auprès des présidents de clubs de Fédérales et de Séries qu’avec ceux de Top 14 et ProD2. Au milieu de ce maelstrom, il y a cependant une proposition que j’apprécie particulièrement : celle qui consiste, quand ils ne jouent pas, à mettre les internationaux français sous contrat fédéral à la disposition des délégations régionales pour assister les techniciens des clubs amateurs. J’aimerais juste voir le visage des enfants de Tyrosse, de Soyaux, de Lille, Vannes et Aubenas quand ils apprendront que Mermoz, Machenaud, Plisson, Jedrasiak ou Médard vont leur apprendre la passe.
Passer, c’est bien le mot, du XV d’en France au rugby d’enfance : voici certainement la meilleure car la plus belle publicité que ce jeu puisse s’offrir à l’heure où les Tricolores, même sous la férule de Guy Novès, ont du mal à retrouver un public.
En attendant, Côté Ouvert va fermer pour quelques jours, le temps que je me ressource en famille et entre amis. Je le laisse passer vos ballons d’oxygène de mains en mains, expertes. En voilà les clefs : sachez raison et passion garder en même temps, alpha et omega de ce blog. C’est notre chance que de bénéficier d’un espace de jeu et de «je». Enrichissons-le. Pour ma part, je vous retrouverai début mai. D’ici là, restez liés.

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Sec à sept

Dixième. Voilà le classement français en rugby à 7. Loin d’un podium aux Jeux Olympiques de Rio. Loin de tout, d’ailleurs. Même si deux fois, cette saison, les Bleus ont accédé à la Cup, phase finale des leaders de poule, petit Graal mensuel du circuit mondial. Mais pourquoi évoquer le 7 ? Parce que Kenya !
Pour la première fois de son histoire, cet avatar du rugby, demi-équipe mais grand terrain, a vu une nation d’Afrique noire – hors Springboks – remporter un tournoi du Championnat du monde. 30-7, face aux Fidjiens en finale, eux qui sont considérés comme les meilleurs joueurs du monde de la spécialité désormais olympique. Un choc, donc.
Demi-finalistes du Mondial 2013 – c’était à Moscou, il faut l’écrire mais tout le monde s’en fout – ils ne sont pas arrivés là par hasard. En 2001, déjà, à Mar del Plata, lors de la troisième Coupe du monde, les Kenyans avaient battu la France. Cette année-là, Jonah Lomu soulevait le trophée. J’y étais. Les Bleus, eux, n’y étaient pas : ils avaient été ridiculisés par ces athlètes d’Afrique si frustres au rugby mais jamais essouflés…
Quinze ans plus tard, le Kenya se hisse sur un sommet quand nous, Français, restons toujours scotchés dans notre vallée de larmes. Il est donc possible de progresser, mais il faut croire que c’est plus facile à Nairobi (cf. photo) qu’à Marcoussis. Ce qui doit quand même nous donner à réfléchir, non ? D’autant qu’au même moment était donné le coup d’envoi du championnat professionnel américain. Coincidence troublante. car au train où avance le wagon bleu, il ne nous restera bien bientôt plus grand chose à gagner. Ni à XV, ni à 7.
7. Vous remarquerez le chiffre arabe plutôt que romain, parce que le VII, en fait, c’est réservé au XIII. Allez comprendre les arcanes, vous… Mais c’est ainsi. Un nom ? Collins Injera. Le jeu ? Savoir quel club le recrutera ? Juste noter qu’il est capable de tirer sans ciller un drop de quarante mètres après avoir inscrit deux essais de sprinteur. Mais pourquoi parler du 7 quand le XV, en France, a du mal à reprendre son essor, et que tout le monde se penche sur le futur de l’équipe de France, Cellule Technique et internautes de ce site compris ?
Parce que vous allez voir, d’ici peu, surtout s’ils montent sur le podium à Rio, débouler en Top 14 quelques-uns de ces Kenyans. Ils se placeront aux deux ailes de nos équipes multiculturelles d’élite, prochains travailleurs immigrés du rugby français, après les piliers roumains et géorgiens, les deuxième-lignes néo-zélandais, les troisième-lignes sud-africains, les demis de mêlée australiens, les ouvreurs anglais, les centres argentins et les ailiers fidjiens.
Restera-t-il de la place pour nos Bleuets ? Pour un Damian Penaud combien de faux JIFF ? Alors parlons de vos dix-sept propositions. Rien d’indécent à cela puisque c’est une réussite. Il est ainsi et ici possible de faire avancer le débat par la démocratie quasi-directe. Au rebond de cette initiative, vous dire que j’ai rapidement reçu quelques appels téléphoniques, mails et sms en provenance de têtes chercheuses LNR/FFR qui trouvent certaines de vos idées interessantes, ami(e)s de ce blog. Nous y reviendrons en fin de semaine sur le site de L’Equipe. D’ici là, ne restez pas sec à sept.

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