Nalaga inscrit le premier essai de Clermont en finale de la H Cup 2013
Il faut l’écrire : j’ai eu tort. Tort de penser que cette finale en terre irlandaise n’avait rien d’européen puisqu’elle associait deux clubs français. Tort de penser que le stade serait aussi vide qu’en 2003 pour Toulouse-Perpignan. Tort de n’avoir pas vraiment envie d’y aller. Quand on se plante de cette façon, sur les grandes largeurs, et bien il ne pas hésiter à présenter son mea culpa. C’est fait.
Maxima, voilà ce qu’elle était, cette finale 2013. Et je vais vous la raconter de l’intérieur, comme si vous y étiez. D’abord, il y a le Leinster. La veille. Qui lâche des accélérations stratosphériques autour de Kearney, Sexton, Cronin, Nacewa, Madigan… Un prélude bleu en Challenge européen dans un stade baigné par le soleil couchant. Un public de connaisseurs, le silence pour les buteurs et le droit de boire des bières en salle de presse. Du rugby, quoi…
« Allez les Bleus ! » chantaient les supporteurs du Leinster, sans doute aussi parce que Sexton va rejoindre le Racing-Métro dès demain et que Ronan O’Gara, du Munster, va le rejoindre. Et pas pour 300 000 euros comme malencontreusement écrit dans les gazettes dublinoises. Ensuite, il y a Dublin, ses docks tous neufs, ses rues piétonnes, ses vestiges vikings et son musée des écrivains, Oscar Wilde et Sean O’Casey, mais surtout James Joyce et Samuel Beckett, les Dublinois du Quartier Latin.
Samedi, il y avait la déferlante des supporteurs auvergnats. Impressionnant, ce long ruban jaune et bleu le long des berges qui mènent à l’Aviva stadium. La Yellow Army a été à la hauteur de sa réputation. « Ici, ici, c’est Montferrand !» résonnait dans le stade, et Jonny Wilkinson y a reçu une ovation digne de Bono quand son nom et son visage sont apparus sur l’écran du stade, quelques minutes avant le coup d’envoi. Ca, c’est rugby…
Cette finale restera comme celle du suspense absolu, un chef d’œuvre d’émotions. Explosion de rugby servie par un casting de rêve. Ceux qui y étaient pourront dire : « J’ai vu le meilleur d’une génération au sommet de son art », Wilkinson, Bastareaud, Michalak, Botha, Rougerie, Nalaga, Bonnaire… Je pourrais tous les citer tellement les quarante six acteurs furent grands dans la victoire comme dans la défaite. En salle de presse, juste devant moi, j’ai vu les yeux embués de Rougerie faire luire son visage de Botticelli, les regards songeurs de Wilkinson et de Bastareaud ; ils hésitaient entre pleurer de joie et rire aux larmes.
Surtout, ce qui m’a marqué, c’est le silence respectueux des deux colonies de supporteurs quand les buteurs, Morgan Parra et Jonny Wilkinson, se trouvèrent tour à tour à l’ouvrage. Auvergnats et Toulonnais ont été à la hauteur de l’événement, à la hauteur des joueurs qu’ils encouragent et qu’ils soutiennent. La grande classe. Ce silence, je vais le garder longtemps comme un cadeau. Il est rugby. C’est du Mozart qui se poursuit une fois cette finale achevée.