L’absence d’un indéniable talent, François Trinh-Duc, fait davantage parler que la présence de quelques jeunes et nouveaux sélectionnés, Menini, Lamerat et Le Bourhis, dont les prénoms ne sont pas mentionnés dans toutes les gazettes, Alexandre, Rémi et Félix, au sein de la liste des trente et un pour la tournée de l’équipe de France en Australie, en juin.
A l’époque, les Tricolores n’étaient pas surnommés les Bleus et leur maillot, comme leur ballon, pesait une tonne sous la pluie et dans la boue qui étaient la météo et les conditions du rugby. Surdoué au poste de pilier gauche, mais aussi d’ailier, sorte de Moscato d’avant l’ère du talk-show pour son sens de la répartie, Amédée Domenech n’avait pas participé – nous étions en 1958 et je n’étais encore qu’une étincelle dans le regard de mon père – à l’aventure de l’équipe de Mias.
«Tu es le meilleur d’entre nous, mais nous sommes meilleurs sans toi.» Voilà ce qu’avait répondu le docteur Pack à ce pilier volant qui ne comprenait pas pourquoi son talent ne lui ouvrait pas en grand les portes de la sélection nationale. Quelques années plus tard, Pierre Berbizier, qui connait bien l’histoire ovale en grand lecteur qu’il est, avait lâché le même jugement en direction d’Alain Penaud, le Trinh-Duc des années 90. A l’époque, j’étais bien le seul à défendre Alain. Il y avait pourtant Franck Mesnel, Philippe Rougé-Thomas, Christophe Deylaud, Didier Camberabero et Thierry Lacroix sur les rangs.
Alain avait des fulgurances uniques. Mais le courant ne passait pas entre le coach tricolore et lui. Berbizier lui avait pourtant offert 19 sélections, tout 1992, 1993 et 1994, pour au final arrêter de l’appeler. En 2008, 2009 et 2010, Marc Lièvremont a tenu Trinh-Duc à bout de bras contre vents, critiques et marées. Pour finalement lui préférer Parra, un demi de mêlée, à l’ouverture du XV de France durant le Mondial 2011, ce qui est sans doute encore plus humiliant que d’être, vingt ans plus tôt, remplacé par Deylaud.
Que reprochent PSA et son staff à Trinh-Duc, actuellement le meilleur ouvreur du Top 14 ? De ne pas améliorer le rendement du XV de France, de ne pas le tirer vers le haut comme avec Montpellier. De négliger le jeu au pied, de ne pas considérer le mouvement de l’arrière et des ailiers adverses lors de sa prise d’informations, de ne pas jouer en préaction mais en réaction. D’être obnubilé par la ligne d’avantage plutôt que de s’arranger pour que ses partenaires la franchissent. De ne pas toujours bien accepter leurs critiques.
Struxiano, Dauger, Barran, Domenech, Gachassin, André Boniface, même Walter Spanghero, mais aussi Mothe, Lansaman, Maso, Gallion, Cabannes, Charvet, Galthié, Penaud on l’a dit, Fritz, Papé, Chabal… La liste est longue des oubliés, des parias, des revenants, des ostracisés. Les raisons sont diverses et variées. Elles racontent la difficulté d’associer quinze talents au sein d’une équipe, car il faut écouter l’harmonie d’un groupe plutôt que de ratiociner sur la somme des individualités qui, souvent, se cooptent.
Talès, Michalak, Plisson, Lopez… Trinh-Duc n’arrive qu’en cinquième position, aujourd’hui, aux portes de Marcoussis. Il faudrait, pour lui faire une place en tête de liste, que les techniciens tricolores modélisent le jeu autour de lui, comme l’a fait Fabien Galthié à Montpellier. Ce n’est visiblement pas leur envie. Problème, le XV de France n’a emballé personne – pas même moi – depuis février 2012. Je rappelle qu’à cette époque, FTD en était l’ouvreur.
«Quand il reviendra, il sera le plus fort». Voilà ce que m’a dit Philippe Saint-André, en fin d’année dernière, au sujet de Trinh-Duc. La porte de la maison n’est donc pas fermée, mais PSA n’a pas envie de lui en donner la clé. Reste que si Montpellier est sacré champion de France avec un super FTD à la baguette, la veille du départ des Tricolores pour l’Australie, ça risque de faire un peu désordre. Pas sûr que François Hollande réagisse comme Mitterrand en 1989 proposant à Fouroux, par la voix de Glavany, d’emmener l’oublié Charvet en Nouvelle-Zélande, Charvet auteur d’un essai de funambule au Parc des Princes face à Toulon en finale du Championnat.
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