Ne vous y trompez pas, à Marcoussis, jusqu’à mercredi, il n’y aura pas que des exercices sans ballon, des entretiens individuels, des tests physiques et des évaluations physiologiques. Durant ce stage de préparation aux matches de novembre, PSA, Bru et Lagisquet cherchent aussi à voir comment ils peuvent assoir un axe central, cette fameuse articulation qui pense, construit et anime le jeu.
Vous l’avez noté, et parfois mieux que moi : depuis trois saisons, le Quinze de France est en déficit de jeu. Et qui en a la charge, du jeu ? Le trio 8-9-10, tiercé gagnant dans le désordre et dans l’ordre, triumvirat qui décide, triplette de belle vie, troïka pour les soirs de grand froid comme ceux qui s’avancent en novembre à l’heure du prime-time, soit juste au-dessus de zéro.
Louis Picamoles et Antonie Claassen ont eu leurs chances en bleu, le premier en puissance ne sait pas faire briller autour de lui, le second plus délié manque de densité. Charles Ollivon, profil à la Imanol, est encore un peu tendre. Du coup s’impose Damien Chouly. Lancé à Brive, découvert à Perpignan, ce troisième-ligne centre est aujourd’hui capitaine à Clermont – un signe qui ne trompe pas. Il évolue et fait avancer une équipe intelligente, joueuse, équilibrée, depuis trois journées en tête du Championnat.
Qui occupera le poste de demi de mêlée ? Ils sont au moins quatre : Maxime Machenaud et Morgan Parra ont longtemps eu les faveurs des sélectionneurs. Ils ont déçu. Arrivent Sébastien Tillous-Borde et Rory Kockott, deux casseurs de défense, deux costauds. L’un qui aime se mettre au service de l’équipe et de son ouvreur, ce qui est assez facile quand il s’agit de Jonny Wilkinson, Matt Giteau ou Fred Michalak. L’autre aime mettre ses qualités en avant et ouvrir les sillages. Ils sont à Marcoussis, en début de semaine, pour justement s’étalonner. PSA, Bru et Lagisquet, sans oublier Blanco, vont les regarder vivre au milieu de leurs coéquipiers et il serait étonnant qu’ils ne se retrouvent pas en bleu dans un peu plus d’un mois.
Reste à trouver l’ouverture. Là, avec le retour en grâce de François Trinh-Duc, l’absence notable et notée de Jules Plisson (présenté pourtant lors du Tournoi dernier comme la huitième merveille et déclassé après le court et triste succès en Ecosse), sans oublier la blessure longue durée de Frédéric Michalak, les cartes sont rebattues. Un an après sa dernière apparition en bleu (c’était face aux All Blacks, un 9 novembre), une nouvelle chance sera donnée à Camille Lopez, revenu à son meilleur niveau.
Dans sa carrière, riche de 49 sélections, François Trinh-Duc a eu l’immense avantage d’être le chouchou de Marc Lièvremont, qui l’a maintenu à la barre du XV de France contre vents et marées, bévues et contre-performances pendant presque quatre saisons avant de le lâcher dans les derniers instant de son mandat. Aujourd’hui, il tape dans l’œil de Serge Blanco qui apprécie son allant, son talent, son énergie créatrice. Après avoir surmonté pas mal de maux, et avant de savoir jusqu’où cette focale le placera, il aura son mot à dire à Marseille ou à Saint-Denis.
Qui paiera, en dix, les pots cassés en Australie sinon Rémi Talès, qui plus en dessous de la ligne de flottaison avec Castres, cette saison ? Les sélectionneurs n’oseront pas aligner en équipe de France la charnière du club lanterne rouge du Top 14 au risque d’être la cible des détracteurs dont le nombre, déjà très élevé, ne manquera pas de grossir encore plus en cas de défaite toujours possible face aux Fidjiens (ces nouveaux magiciens de notre Championnat), à Marseille, le 8 novembre prochain.
Ne vous y trompez pas, pour le staff technique tricolore, l’enjeu de ses prochaines journées n’est pas de trouver un triangle arrière ou une première ligne, mais bien d’imaginer quelle association de bienfaiteurs va pouvoir ordonner le grand chantier en jachère depuis le 11 novembre 2012 et cette victoire grand format, 33-6, face à des Australiens jaune pâle. C’était il y a deux ans. Déjà.