Adopte un joueur

François Trinh-Duc, Morgan Parra et Sofiane Guitoune sur le flanc, il est temps, ami(e)s de ce blog, d’aider le staff tricolore à composer sa liste des trente pour le premier test de novembre, celui du 8, au stade vélodrome de Marseille. Pour affronter les Fidjiens, je vous propose de laisser les «conventionnés» au repos. Ils jouent trop, leurs entraîneurs râlent et en plus ils se blessent, cf Wesley Fofana, au moment d’effectuer des tours de terrain.
Osons relancer ceux qui ont faim. Faim de ballon, de reconnaissance, de sélection. Ceux qui seraient prêts à sacrifier presque tout ce qu’ils ont de plus cher pour (re)disputer un test-match avec le maillot du XV de France sur le dos, quel que soit le numéro porté, d’ailleurs. Relançons les oubliés, sortons des tablettes ceux qui sont tombés aux oubliettes.
Car enfin quoi, on leur offre royalement une sélection, voire deux dans un grand élan de générosité, et ensuite ils retournent dans l’oubli, rejoignent l’endroit d’où ils étaient partis, d’où ils avaient cru s’élancer vers des sommets rêvés. Cette sélection, ou deux, pèse d’un poids terrible dans leur curriculum vitae. Elle vaut qu’on se donne pour elle, mais ne vaut pas grand-chose en définitive.
Ils sont là, en rang serré, alignés sur le site fédéral, comme des soldats sacrifiés. Le Top 14 en regorge que ça fait mal au cœur. J’en ai compté trente-trois, sur leur croix qui attendent que les sélectionneurs veuillent bien se souvenir d’eux. Ils seraient prêts à mourir pour la cause, j’en suis certain, si on leur en (re)donnait la possibilité. Juste une fois de plus, une seule, pour montrer qu’ils valent mieux qu’un éclat éphémère.
Ils ? Le Bourhis (26 ans, 1sélection), qui brille au centre de l’UBB. Avec lui Thibault Lacroix (29, 2), David (26,4), Mazars (30, 2), Boussès (32,1) ou Mignardi (27, 2). A l’arrière, Porical (29, 4), Peyras (30,1), Floch (31,3), Thiery (30,4) ou Palisson (27, 21). Aux ailes, Arias (30,2), Planté (29,2), Coux (33,2) ou Malzieu (31,20).
A la charnière ? Beauxis (28 ans, 20 sélections) à l’ouverture, Tomas (29, 3) à la mêlée. Deux délaissés désormais à maturité. En troisième-ligne ? A choisir parmi Lakafia (25,3), Puricelli (33, 4), Caballero (31,1), Martin (35, 23), et Diarra (31, 1). En deuxième-ligne ? Millo-Chluski (31,18), Jacquet (29, 4), Mela (34,4) et Samson (30, 5) sont là. Vous pouvez compter sur eux, messieurs du comité de suivi, en cas de besoin.
Ils ne sont pas dans les trente «conventionnés», ni dans les trente «supplémentaires», mais si la première ligne venait à s’absenter, Kotze (27,1), Watremez (25, 1), Noirot (33,1), Mach (28,3), Correia (30, 1), Boyoud (34,3), Barcella (30, 20), Brugnaut (32,2) et Attoub (33,4) répondraient présent, à n’en pas douter. C’est dire la richesse du rugby français.
C’est la liste des «oubliés», la troisième liste, tellement bien cachée que personne ne sait plus où elle est passée. Cette liste, touchante, se lit avec les tripes. Pour certains, elle fait mal car les cicatrices ne sont pas toutes refermées. D’autres ont l’impression d’avoir été sacrifiés trop jeunes, ou d’avoir été testés trop vieux. S’il y avait la possibilité de composer un XV de France du rachat quand les titulaires du dernier Tournoi et ceux de la tournée catastrophe de juin en Australie ont failli, je vous promets que je donnerai cher pour.
Palisson (Toulouse) – Planté (Racing-Métro), Le Bourhis (Bordeaux), David (Toulouse), Arias (Stade Français) – (o) Beauxis (Bordeaux), (m) Tomas (Stade Français) – Diarra (Castres), Lakafia (Stade Français), Puricelli (Lyon) – Mela (Brive), Jacquet (Clermont) – Attoub (Montpellier), Mach (Castres), Brugnaut (Racing-Métro). Avec cette équipe-là, on pourrait relancer les Probables-Possibles des années Ferrasse, quand le XV de France des assurés se coltinait une sélection d’enragés qui cherchaient à se faire remarquer.
C’est ainsi qu’en 1968, à Grenoble, les Tricolores de Christian Carrère en route vers un Grand Chelem s’étaient fait dépecés par des Alpins coriaces, les frères Camberabero (La Voulte), Greffe (Grenoble), Noble (La Voulte) et Yachvili (Tulle) gagnant leur place pour Colombes puis Cardiff, Lacaze (Angoulême), Bonal (Toulouse), Plantefol (Agen) et Lasserre (Ange) profitant de la défaite du XV de France dans ce match de gala en marge des Jeux Olympiques pour embarquer eux aussi dans le train bleu.
On peut toujours rêver et l’heure n’est pas au match supplémentaire. Mais un petit tournoi triangulaire à Marcoussis entre conventionnés, supplémentaires et oubliés ne serait pas piqué des hannetons. On ne garderait alors que les valides pour affronter, le ballon entre les dents, Fidjiens, Argentins et Australiens. A une certaine époque, les Néo-Zélandais raffolaient de ces rencontres. Elles étaient télévisées, attiraient tout ce que le pays comptait de connaisseurs, c’est-à-dire les trois millions d’habitants. C’est d’ailleurs à l’issue de l’une d’elle qu’un jeune monstre culbuta la gloire des All Blacks, John Kirwan, et gagnant sa place dans le squad. C’était en 1994. Il s’appelait Jonah Lomu.
[Pour cause de vacance(s), le prochain blog sera disponible vendredi 31 octobre]

Ce contenu a été publié dans rugby. Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.