Il arrive parfois que les centres d’intérêt s’entrechoquent, que les informations se télescopent. Et c’est comme si les pôles, nord et sud, entraient en contact. Au nord, le CNR et l’équipe de France ; au sud le Top 14 son club phare et la promesse d’une irruption, l’annonce du réveil d’un volcan qu’on croyait éteint.
Samedi dernier, le choc des buzz fut vraiment tellurique. D’un côté l’annonce très médiatisée de la venue – 1) probable, 2) possible, 3) assurée, 4) confirmée, 5) éventuelle, 6) envisageable (cochez la case qui vous convient) – de Ma’a Nonu à Toulon la saison prochaine ; de l’autre la révélation face aux Fidji des pousses bleues, le jeune Teddy Thomas et le moins jeune Alexandre Dumoulin.
Tout le rugby français, ses limites, ses dilemmes, ses contradictions, ses impératifs économiques mais aussi sa force, son histoire, ses ressources et sa réussite s’est retrouvé compacté dans ce double événement : la signature (qui n’est pas encore actée) d’une star néo-zélandaise en fin de carrière pour rejoindre le Top 14 et l’avènement de purs produits bio cultivés dans la maison Marcoussis.
Sortir l’information, à savoir la présenter, ne suffit plus aujourd’hui : il faut l’enrober, ménager l’effet, quitte à prendre un peu d’avance sur la réalité. Car sans le buzz médiatique point de salut. En ce qui concerne Ma’a Nonu, le moins qu’on puisse dire c’est que l’effet obtenu est particulièrement réussi. Pour un joueur qui n’a pas encore mis les pieds sur la rade, c’est comme s’il allait jouer dimanche à Mayol.
En revanche, concernant le cas d’Alexandre Dumoulin et de Teddy Thomas, pour savoir qu’ils étaient issus de la filière bleue, promotion Albert Ferrasse pour le premier et René Deleplace pour le second, il a fallu attendre et chercher un peu. Pourtant, à l’heure où le débat sur la sélection des étrangers (Atonio, Kockott, Spedding) secoue les réseaux sociaux, il aurait été judicieux, du côté de Marcoussis, d’envoyer ne serait-ce qu’un tout petit tweet dès la fin du match.
Vous apprécierez l’œcuménisme dont fait preuve la FFR au moment de nommer les promotions. Ferrasse et Deleplace, là aussi deux pôles antagonistes. Don Corleone avait fait d’Agen le Little Italy d’Ovalie quand la tête dans les étoiles, l’inconnu du Nord inventait le rugby de mouvement. L’un radical de souche l’autre communiste par conviction. Qui finirent par se retrouver Cité d’Antin à l’initiative de Pierre Villepreux à la fin des années 90.
Yacouba Camara et Baptiste Serin se retrouveront sans doute en Bleu coq à l’horizon 2019 pour intégrer le XV de France, promotion Benoît Dauga, soit 2012/2013. Avant le Mondial enrichi prévu au Japon, le talonneur Romain Ruffenach (Biarritz), les ouvreurs Vincent Mallet (Stade Français) et François Bouvier (Toulouse), le centre Etienne Dussartre (Racing-Métro) et les troisièmes-lignes François Cros (Toulouse) et Tanguy Molcard (Biarritz) ne seront sans doute pas, eux eux, très loin du compte.
Entre-temps, les clubs – enfin pas tous, quand même – d’un Top 14 diffusé conjointement par BeIN Sports, Canal Plus et Eurosport, jonglant avec leur salary cap de dix millions d’euros, auront tout fait pour récupérer Daniel Carter, Richie McCaw, Tony Woodcock et Ben Smith, Jean De Villiers, Schalk Burger et Tendai Mtawarira, Charlie Faumuina et Conrad Smith, Quade Cooper et Will Genia, sans oublier de se lamenter au sujet du tarif trop élevé des deux Israël : Dagg et Folau.