Je n’ai jamais trouvé mieux qu’un club-house pour vivre le rugby. Le terrain c’est bien mais on passe trop de temps à regarder la vidéo, ces derniers temps. Surtout pour découvrir qu’on connait le scenario, qu’il est sans surprise et que l’essai aurait dû être accordé immédiatement sans passer par la case magnéto. Cette innovation, si j’en crois certains joueurs qui s’en sont ouvert «off the record» est comme l’écran : elle tombe souvent à plat.
Au moins là on peut refaire le match avec de meilleures images, c’est-à-dire celles que l’on garde présentes à l’esprit et dont la qualité, c’est notable, s’améliore au fil du temps, parallèle avec le bon vin, ce qui nous permet d’enchaîner avec le fait que dans un club-house qui se respecte, il y a toujours un pilier de bar qui a joué avec les légendes du cru, – toujours bon, le cru – et même avec votre père.
Dans un club-house nous sommes entre nous, un peu comme ici sur ce blog qui ne ferme jamais. Pas besoin de développer le propos, de l’illustrer, d’y mettre des sous-titres, nous nous comprenons à demi-mots, partageons les mêmes définitions de ce que signifient «valeur», «marron», «trou» et «Pink Floyd», surtout avec ceux qui ne savent pas que Nick Mason a disputé plusieurs fois les 24 heures du Mans.
Alors qu’elle ne fut pas ma joie de recevoir, en avant-première,l’ouvrage de nos amis bloggeurs Antoine Aymond, Frédéric Humbert et Nemer Habib intitulé «Rugby Clubs de France», florilège d’anecdotes et de photos inédites, érudition discrète et parti pris assumé. Un gros bouquin large comme un ballon, épais comme une baffe de Palmié, tendre comme un souvenir d’enfance.
Dans sa préface, coup d’envoi majuscule, un certain Pierre Albaladejo parle des valeurs éthiques et éducatives de ce jeu, et chacune de ses lignes, comme une passe, vaut pour la justesse, la pertinence et la précision. Il y parle de lui comme jamais je ne l’ai lu et ça n’a pas l’air d’être à la première personne tant le propos touche à l’universel. C’est notre esprit qu’il ouvre, Bala, et pas seulement cet ouvrage.
Quarante-quatre clubs racontés comme si nous étions au club-house, maillots d’époque sous verre, cartes postales pour timbrés, trophées sur l’étagère et bière à volonté. Et puis il y a les équipes-types. Là, je me suis pris au jeu. J’ai pourtant l’habitude d’en composer, le lundi, sur L’Equipe.fr… Je sais ce qu’il faut de mauvaise foi et de subjectivité pour irriter le chaland. Et bien j’ai craqué à mon tour, j’ai cherché Pierre Villepreux et André Brouat, Jonny Wilkinson et Jérôme Bianchi. Mais j’ai trouvé Jacky Adole, Philippe Guillard et Hervé Tilhac.
Je vais lui offrir ce livre, d’ailleurs, à Jacky Adole. Nous avons rendez-vous la semaine prochaine à Limeuil, là où la Vézère et la Dordogne se rejoignent, pour parler – ça va durer longtemps – rugby, champignons et littérature. Aussi de Périgueux, de Carcassonne et de La Rochelle, trois clubs chers à son cœur ovale. Parce qu’il y a toujours un écusson, la couleur d’un maillot ou une composition d’équipe pour nous ramener au jeu de notre enfance. Moi, j’avais douze ans, c’est en jaune et noir, à Marcel-Deflandre, sous la pluie face à Toulon à la fin de l’automne 1971. Et vous ?
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