Pas souverains en mêlée, inexistants sous les coups de pied de renvoi, secoués sur les impacts, trop de plaquages manqués, Michalak contré au premier dégagement, des lancers en milieu d’alignement facilement détournés. Et Jonah Lomu bis, Julian Savea, qui marque en puissance, explosant trois Français en quatre foulées. Nakaitaci, Spedding et Slimani sur le cul pendant que Picamoles, auteur de l’essai de l’espoir, souffre de la hanche. 29-13 à la pause.
Ou boire le calice jusqu’à l’hallali. Défaite contre l’Irlande (24-9) alors que Philippe Saint-André en avait fait le tournant de son médiocre quadriennat. Marée noire à Cardiff, 41-13, là même où huit ans plus tôt, une équipe de France s’était montrée à la hauteur de sa réputation. Deux rendez-vous manqués. Manqué, complétement, comme le mandat de Saint-André.
J’y ai cru, pourtant. Cru que PSA serait capable d’insuffler son esprit de compétiteur au XV de France, cru que les quatre années de tâtonnements seraient contre balancées par une Coupe du monde de qualité. Hélas, le désastre est total. Pas un domaine dans lequel puiser un début de satisfaction. L’horreur et le néant.
Certes, cette génération est minuscule. Qui, parmi les Tricolores d’aujourd’hui, peut revendiquer une place dans un XV Mondial ? Personne. Alors dans un Quinze bis ? Toujours personne. Il y aurait des Japonais, comme Goromaru et Leitch, Gorgodze, mais pas de Français. Surtout pas Dulin, Naikataci, Maestri, Papé, Michalak, Dumoulin, transparents, dépassés, nuls parfois. La catastrophe des sélections.
A l’heure de jeu, la France a craqué. Les piliers kiwis perçaient au milieu de piquets rouges. La honte. Même en 1991, battus par les Anglais en quart de finale, les Tricolores s’étaient battus jusqu’au bout. Là, samedi soir, à Cardiff, où sont passés l’honneur et la fierté, à défaut de fond de jeu et de plan tactique ? Au fond de la rivière Taf.
61-10. 9 Juin 2007. Tournée abandonnée à Wellington. Castaignède, Califano, Papé, Pierre, Chouly, Magne, Chabal, Ouedraogo, Ibanez et Mas portaient le maillot bleu. Fiasco anecdotique. A Cardiff, ce 62-13 entre dans les annales. Jamais quart de finale de Coupe du monde n’a été aussi disproportionné. La France est devenue une nation de Tier 2. Au moins, la Namibie avait inscrit quatorze points contre les All Blacks en match de poule, le 24 septembre, au stade Olympique. Un de plus que ces Tricolores. On riait presque jaune de voir Ma’a Nonu, trente-trois ans, sprinter comme un junior en fin de match. Et Talès sortir le ballon hors des limites du terrain pour éviter le dixième essai «historique».
Croisé dans la salle de presse de Twickenham, vendredi, l’ancien ouverture du XV de la Rose, Stuart Barnes, m’avouait ne «pas souhaiter que cette équipe de France battent les All Blacks. Il ne le faut pas. Pour le rugby. J’adore le jeu à la Française mais là, cette équipe de France ne sait pas jouer. Il faut au contraire que ce soit la Nouvelle-Zélande qui l’emporte. Parce que les All Blacks se font des passes, mettent du mouvement, de l’intelligence, et c’est vers ça qu’il faut tendre. J’espère même que cette équipe sera écrasée et disparaitra de la compétition, et qu’on en parle plus. Et Dieu sait si j’aime la France et son rugby. Mais là, elle représente tout ce que je déteste.» Le score et le contenu de ce quart de finale lui donnent raison.
Je m’attends pour ma part à un tombereau de critiques sur mon incapacité à percevoir la réalité, et ça sera sans doute pleinement justifié. On me reprochera mon soutien à ce XV de France pendant quatre ans, mon absence de remords et le faible degré de pertinence de mes jugements. Et à ce que ma chronique d’aout 2011 – la deuxième de ce blog – ressorte comme un geyser. L’heure est aux boucs-émissaires. Aux clous qu’on plante sur ma croix. De Saint-André.