SOS médecin

Le rugby alternait naguère contacts et évitements. Il se résume désormais en de multiples collisions. Les commotions obligent les joueurs à sortir du terrain afin de subir un protocole. L’intervention régulière de staffs médicaux des clubs  – la dernière en date au stade Pierre-Mauroy de Lille pour Cramond – n’est pas entourée de toutes les garanties. Ce constat, guère réjouissant pour la santé et l’intégrité des joueurs, engendre ici la réaction d’un bloggeur, Alain Sauné, aka «Tautor», ancien joueur, médecin urgentiste en Top 14, ProD2 et Fédérale 3, membre de la commission médicale du comité Midi-Pyrénées pour les sélections moins de seize et dix-sept ans, texte que je soumets à votre sagacité.
«Le rugby professionnel est une affaire de professionnels. Mais rien n’est fait par les commissions médicales LNR et FFR, parents pauvres, pour avoir le meilleur professionnalisme au bord du terrain. L’exemple typique concerne la commotion cérébrale.» Face au pays de Galles, le troisième-ligne aile international parisien «Antoine Burban sort pour le protocole et revient dix minutes minutes plus tard.» Le week-end suivant, il était encore victime d’un KO à Pau, avant d’être interdit de pratique sportive pendant un mois.
«En revanche, lors du match France-Angleterre, le capitaine Dylan Hartley, victime d’une commotion cérébrale, est pris en charge par le staff médical anglais avec l’aide d’une équipe de secouristes, selon les normes en vigueur. Seule manquait la voiturette. Samedi, lors de Toulon-Racing, commotion cérébrale avec hémorragie nasale ou buccale ? Sans secouristes, sans soins adaptés, un zombie est évacué entre le médecin et son adjoint ! Stop.
Il est grand temps que le rugby se dote d’une médecine professionnelle. Primo, il faut être au moins médecin du sport, ce qui n’est pas le cas sur le Top 14 et la Pro D2. Secondo, ceux qui ne pratiquent pas la médecine d’urgence devraient être formés, non pas à des stages de complaisance, mais par des spécialistes, laquelle formation comprendrait, comme en Angleterre, un examen écrit (on est reçu si on a plus de 75% de bonnes réponses) qui donne droit ensuite à une formation pratique sur deux semaines. Au terme de quoi vous pouvez officier sur les terrains pendant deux ans, licence renouvelable.
Le staff médical doit s’adjoindre une équipe de secouristes professionnels, rompus à la prise en charge standardisée d’une commotion. Aujourd’hui, une commotion cérébrale, ou perte de connaissance, voire un coma, est prise en charge – dans le domaine public – par le SAMU et les pompiers ? Pourquoi pas en rugby ? Un médecin ne peut gérer à la fois le terrain et l’infirmerie. Il faut déléguer ces tâches à un urgentiste, médecin indépendant. Ne faudra-t-il pas créer comme en F1 une vraie infirmerie, disponible pour les deux équipes avec des moyens techniques et humains adaptés ?
Il en est de même pour les plaies : pourquoi limiter le temps d’un saignement à dix minutes ?  Et les fractures… Il est nécessaire d’avoir à disposition tous les types d’attelles afin d’immobiliser proprement les fractures, meilleur traitement antalgique en première intention. Lors le match Grenoble-Stade Français, le joueur victime d’une luxation du coude sortit avec une attelle, mais elle correspondait à celle utilisée pour un membre inférieur. Encore une preuve d’amateurisme.
Il faut ensuite prendre en charge la douleur. Pour cela, il est nécessaire de disposer de médecins aguerris à la pratique des injectables. A quand l’utilisation du Méopa (gaz hilarant) pour manipuler des fractures, des luxations, voir suturer des plaies ? Vous l’avez compris, en rugby, nous sommes encore au stade de la médecine rurale. Et si on parle dopage, un contrôle ne peut démarrer qu’à la fin du match, et non avant comme ce fut le cas à Lille…»
Ce «dossier» médical est un pavé dans la mare – le marigot ? – de la LNR et de la FFR. J’avais souhaité, lors de notre première rencontre au restaurant Les Quinconces en marge des dernières demi-finales, à Bordeaux, que ce blog soit aussi le vôtre, internautes, et que vous puissiez exprimer, dans cette vitrine, le meilleur de vos coups de gueule et de vos coups de coeur. C’est désormais le cas. Je m’en réjouis.

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