Enfin, c’est arrivé ! Depuis qu’ils ont accepté de devenir les adjoints de Philippe Saint-André auprès de l’équipe de France, Patrice Lagisquet et Yannick Bru se sont sentis entraîneurs. Ça leur était déjà un peu arrivé, m’a avoué le Biarrot, dimanche dernier, à Marcoussis. Lors de la tournée de juin 2013 en Nouvelle-Zélande. A l’occasion d’un ou deux entraînements. Mais jamais dans la continuité.
Pour la première fois, donc, au Canet-en-Roussillon, lors du stage d’avant-Tournoi, Bru et Lagisquet ont bossé comme ils en avaient l’habitude avec Toulouse et Biarritz. Avec cette exigence qui les caractérise, ils ont pu faire travailler leurs joueurs sur les détails qui font le sel du très haut niveau. Pour ne prendre qu’un exemple, les trois-quarts tricolores ont touché – enfin – du doigt une forme d’absolu.
Chronomètre en main, Patrice Lagisquet leur a demandé d’acheminer le plus rapidement possible le ballon en plein course. Du demi de mêlée à l’ailier. Après quelques répétitions, les attaquants tricolores sont parvenus, d’après leur coach, à assurer des passes sèches dans le berceau des mains, courses rentrantes et buste haut. En me disant cela, «Lagisque», volubile, avait le sourire.
Justesse. Tel est désormais le credo des entraîneurs du XV de France ! Ils ont vu défiler tellement de passes approximatives, de placements erratiques, de coups de pieds dévissés, de rucks au plongeoir et de combinaisons bafouillées en 2013 que cette année, l’accent – grave – est porté sur la qualité technique. En conférences de presse, PSA, Lagisquet et Bru ne couvriront plus, désormais, les défaillances individuelles de leurs joueurs.
Jamais un groupe France n’a eu autant à consacrer à un match du Tournoi. Deux semaines non-stop à effectif complet, mis à part la parenthèse des sept renvoyés le week-end dernier dans leurs clubs. Il n’y aura donc aucune excuse en cas de défaite, samedi, au Stade de France, face à l’Angleterre. Les Tricolores, joueurs et staff, jouent gros d’entrée. Heureusement, pour une fois, la préparation a été à la hauteur du challenge.
Nous regarderons donc à la lumière des exigences identifiées le contenu de ce Crunch, «le match le plus important depuis que je suis entraîneur de l’équipe de France», précise PSA. En espérant que de Thomas Domingo à Brice Dulin, les Tricolores sachent et puissent enchaîner quatre-vingt minutes durant les gestes justes à pleine vitesse. Ce qui fait la force – «position, possession, pace» – des All Blacks
«Pace». Autrement dit rythme. Plutôt que vitesse. Cette notion induit un tempo collectif maintenu, une chaîne de courses sans ballon et de passes, de placements et de prise de la ligne d’avantage. Ce qu’on appelle l’art d’attaquer. Un savoir-faire que le staff tricolore – qui a été très tolérant pendant deux ans – exige désormais.